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Chloé Sainte-Marie: muse de la poésie québécoise

Un commentaire de Roger T. Drolet

30 octobre 2006 (QIM) – S'il faut identifier la porte-parole actuelle de la poésie québécoise, il convient de nommer Chloé Sainte-Marie et l'en remercier. En tournée québécoise, au moins jusqu'en avril 2007 avec son spectacle Parle-moi, du nom de son plus récent disque, la muse du cinéaste Gilles Carle est dorénavant celle de l'ensemble des poètes de la québécitude et elle y additionne la mélodicité. Sans aucunement revendiquer une prise de position politique, l'interprète n'en demeure pas moins très ancrée au destin tragico-politique de sa terre natale par son engagement à ce pays fragile ainsi qu'à celui de la destinée de l'humanité souffrante via les auteurs qu'elle chante magnifiquement.

Chloé est une femme branchée sur l'essentiel et son parcours témoigne d'une quête existentielle sur le sens de la vie. Elle le démontre sans ambages en déclinant une sélection de textes publiés par plusieurs grands poètes (Gaston Miron, Roland Giguère, Alexis Lapointe, Patrice Desbiens, Joséphine Bacon et Gilles Carle), minutieusement mis en musique par Gilles Bélanger, Réjean Bouchard et quelques autres, tout en se taillant une place bien à elle dans le paysage artistico-musical du Québec contemporain. C'est ce que l'artiste fait avec douceur et compassion sur disque et sur scène, comme elle l'a démontré une fois de plus lors du spectacle du 20 octobre dernier en la salle Octave-Crémazie du Grand Théâtre de Québec devant un public conquis d'avance.

Le présent spectacle est essentiellement axé autour de cet album cité plus haut, branché sur le monde actuel, mais aussi sur l'essence de la vie qui nous interpelle, quelles que soient notre origine ethnique et nos valeurs morales. Une courbe dramatique parfaitement maîtrisée amène le spectateur dans un univers où la sensualité et la lucidité frôlent le désarroi. Dans une approche tout en douceur, le spectacle, acclamé par la critique et le public, est présenté sobrement avec une humanité qui touche à coup sûr. Flanquée de deux bons complices, les multi-instrumentistes Réjean Bouchard et Gilles Tessier qui savent élaborer des ambiances musicales subtiles et parfaitement appropriées avec guitares, clavier et percu aux accents folk, country ou plus romantique.

Sa renommée s'étend dorénavant dans la francophonie puisqu'en juillet dernier, l'Académie Charles Cros a choisi d'honorer Chloé Sainte-Marie pour son album "Parle-moi" en lui décernant le prix Coup de coeur de la chanson 2006. Ce choix s'est fait parmi plus de 500 disques proposés et issus de partout dans la francophonie. Ce n'est pas rien.

L'artiste qui s'est d'abord fait connaître par le cinéma, dorénavant dans son personnage de femme-enfant inspirée, n'est pas sans rappeler une Jane Birkin qui s'investit totalement dans son rôle de médium entre ceux qui ont quelque chose à dire et ceux qui veulent entendre, faisant confiance à l'intelligence de celui ou celle qui écoute, sans aucun esprit mercantiliste. Ceci est rare et il faut le saluer. Mme Sainte-Marie et son équipe ont cumulé 5 nominations au 28e gala de l'ADISQ et la dame s'est vue attribuer le Félix du Spectacle de l'année - Interprète. Il faut dire que l'honneur est amplement mérité!