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Paradis perdu ou comment allumer les consciences?

Un commentaire de Roger T. Drolet

Paradis perdu

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Paradis perdu

1er février 2010 (QIM) – Un soldat-jardinier, dernier homme sur terre, se voit accorder une deuxième chance de faire renaître la vie, détruite par la civilisation, sur notre planète fragile. Y parviendra-t-il? Telle est la question impossible que Dominique Champagne, auteur et metteur en scène, pose aux spectateurs dans ce spectacle hallucinant présenté, encore pour quelques jours, au Théâtre Maisonneuve de la Place des Arts de Montréal.

En première médiatique mondiale, nous avons pu voir, le jeudi 28 janvier dernier, cette construction poétique emblématique supportée par une technologie dernier-cri, qui a nécessité une créativité inouïe.

Inspirée d'un poème de John Milton, l'oeuvre est très ambitieuse et les efforts de Champagne, metteur en scène de Love du Cirque du Soleil d'après l'oeuvre des Beatles, et du scientifique Jean Lemire de la Mission Antarctique, donnent lieu à une prestation fantasmagorique éblouissante, surtout par sa forme, et innovante sous plusieurs aspects.

Alliant théâtre, musique, danse, cinéma, mouvements aériens et projections d'images, Paradis perdu met en scène le conteur, le personnage central, son fils, la fille-mère et l'enfant. Pierre Lebeau narre ce poème apocalyptique en étant présent sur scène aux côtés du soldat humaniste personnifié par Rodrigue Proteau, le Sergeant Pepper de Love. Ces individus seront au centre des bouleversements extrêmes de la planète et du désastre qui s'ensuit. Ils auront littéralement le sort du monde entre leurs mains. Qu'en feront-ils?

Grâce à une trouvaille de Champagne, ce sont des tonnes d'un matériau composé de feutre inifugé déchiqueté qui fait office de sol et sur lequel se reflètent les magnifiques images multicolores dans lesquelles les comédiens marchent, dansent, se révoltent et trébuchent. La scène elle-même est inclinée de 12 degrés pour accentuer les effets visuels. Les images en 3D et la scénographie de Michel Crête et Olivier Goulet sont tout à fait grandioses et nous transportent littéralement dans une nature extrême qui nous envahit. La musique de Daniel Bélanger, pour sa part, est emblématique du post-modernisme propre à la civilisation actuelle.

Il existe malgré cela un inconfort à la sortie de la représentation d'une heure trente. Le monologue presqu'ininterrompu de Lebeau est parfois lourd et aurait certainement pu être écourté. Parfois, sa voix se superpose à celle de Bélanger intégrée à la musique. Le jeu très physique des autres personnages est parfois peu crédible et distrayant. Quant au propos lui-même il est, certainement volontairement, réducteur quand aux causes et effets de l'activité humaine sur la planète: jamais, sauf pour l'oiseau, on n'évoque la présence animale ni l'activité industrielle comme telle dans le désastre écologique qui nous guette.

Le Paradis perdu de Champagne et Lemire est tout de même percutant dans sa forme et la production nous éblouit. Sa présentation, fort pertinente en ces temps troublés, nous interpelle sur notre rôle social et sur cet avenir que la plupart d'entre nous souhaite plus vert que noir.